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Page:Girard - Contes de chez nous, 1912.djvu/75

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toute mauvaise langue, laisser s’évaporer les effets de votre gloutonnerie, et de quelle manière me témoignez-vous votre gratitude ?… En me jetant à la tête une invitation de bridge !… Ingrats !… mais vous êtes donc plus enragés que mes cannibales de là-bas !…

Et, comme il terminait cette tirade, qu’il avait débitée tout d’un trait, sans reprendre haleine, ses yeux tombèrent sur un jeu de cartes charmantes, exquises, délicieuses, brillantes, qui semblaient cligner de l’œil, pour l’inviter à jouer.

Charles, à cette vue, devient pourpre.

Il ne fait qu’un saut.

S’emparant avec rage de ces cartes, il les lance par la fenêtre… Les pauvres s’envolent à droite et à gauche, tourbillonnent comme une pluie d’or poussée par la rafale, et vont s’abattre en horoscope sur la tête des passants amusés…

— Il devient fou !… murmurai-je, ajoutant presque foi à mes paroles propres.

Charles m’avait entendu.

— Ah oui ! je deviens fou, tu dis, le grand Girard, eh bien ! je serais curieux de savoir si toi et les autres ne le seriez pas devenus avant moi, la même aventure vous étant arrivée ?…

Écoutez :

Las d’inhaler à pleins poumons la poussière microbienne de notre ville enfumée, dégoûté de l’eau grisâtre que nous fournit le réservoir assassin, fatigué des confidences et des jérémiades de clients qui ne nous paie-