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que vous n’auriez pu, vous, pêcheurs endurcis, vous écrier avec le poète :


« Le jour n’est pas plus pur que le fond de mon cœur. »


Vous est-il jamais arrivé de vous arrêter devant une toile de maître dont le pinceau magique semble plutôt avoir reproduit un paysage de son imagination qu’une scène réelle de la nature, un paradis terrestre au vingtième siècle, peint avec les couleurs les plus merveilleusement belles ?

Eh bien ! tout ça, c’est de la paille à côté du pays enchanteur où je descendis une matinée du quinzième jour de juillet, en l’an du Seigneur mil neuf cent neuf.

D’un côté, la mer, la mer à perte de vue, avec sa mystérieuse mélancolie, ses voiles blanches sous les feux étincelants du soleil, et le phare qui s’avance, là-bas, au loin, dans les eaux bleues… Et tout près de moi, à mes pieds, c’est la vague charmeresse, étouffant ses mugissements comme un fauve dompté, qui vient s’abattre sur la grève solitaire…

À ma droite, j’aperçois des côtes vertes, fleuries, couvertes de bosquets sans nombre, émaillées de lilas et de pommiers en fleurs, dont le parfum délicat est imprégné d’un arôme salin.

Tout cela est moucheté de points brillants aux couleurs les plus légères et les plus gaies. Ce sont les maisons qui, à mesure que l’on monte, se dessinent plus nettement, pimpantes et parées de fleurs comme des jeu-