XI
LE CIMETIÈRE
Baptiste, aussitôt après la messe, accourut au presbytère.
Il arriva tout essoufflé dans la cuisine.
La vieille Marianne était occupée à préparer le déjeuner de son maître. Des grillades de lard, mariées à des œufs au miroir, chantaient dans la poêle une voluptueuse chanson. Le cordon bleu, que soixante-cinq hivers avaient tourné au blanc, était plongé dans la préparation d’un plat de haricots. Aussi Baptiste dut-il répéter par deux fois :
— Marianne ! Marianne !
La soigneuse servante, tirée de sa rêverie culinaire mise en action, sursauta sur sa chaise :
— Tiens, Baptiste ! Ah ! bonne sainte Anne, qu’est-ce que tu viens « bretter » à c’t’ heure icitte ?
— Dis donc, Marianne, sais-tu ben que ça sent bon ce que tu fais cuire là !
Et Baptiste huma l’air comme un épagneul qui vient de découvrir la piste d’un succulent gibier.
— Oui, mais c’est pas pour ton nez.
— Çà, je l’sais. C’est pour m’sieu le curé.
« Sais-tu ce qu’y m’a dit m’sieu le curé ?
« Eh ben ! y m’a dit que tu fricassais comme pas une. »
— Vas donc, hein ! fit Marianne qui crut grandir sur-le-champ de cent coudées dans son indispensable profession.