Page:Girardin - La République et les Républicains.djvu/14

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souhaiter que le peuple recueille le fruit. — Une fois pour toutes, quand nous disons le peuple, nous voulons dire tous les citoyens, sans aucune distinction. — Il a vu ce que deviennent, à l’application, les théories d’un honnête homme, d’un esprit élevé. Puisse cette expérience le prémunir contre l’application d’autres théories, semblables à ces feux follets qui brillent d’un vif éclat, et conduisent dans un bourbier l’imprudent qui les suit.

Est-ce à dire que les auteurs de ces théories ne soient pas des hommes d’un mérite supérieur ? Est-ce à dire que leurs élucubrations fantastiques soient sans aucune utilité ? Non certes. Nous n’avons pas les yeux assez fermés à la lumière pour méconnaître le talent du chef des fouriéristes, ni tout ce qu’il y a de réellement progressif et de bon dans ses combinaisons phalanstériennes. Nous regardons les ouvrages de M. Fourrier comme excellents à consulter par tous les législateurs amis de l’humanité. Mais nous n’admettrons jamais qu’il faille conclure de là la nécessité de transformer le sol de la république, ses villes, ses villages, ses campagnes, en autant de phalanstères. Comme tout est borné dans l’homme, il faut aussi poser des bornes à ses institutions, les meilleures en apparence ; car, comme nous l’avons déjà dit, on se fourvoie infailliblement quand on ne cherche pas le possible avant tout.

Somme toute, il convient donc de rendre justice aux fouriéristes comme à des hommes consciencieux, qu’anime l’amour du bien public, et qui, s’attachant à la poursuite d’une erreur, ont trouvé sur leur route beaucoup de vérités de détail.

Les fouriéristes sont des socialistes monomanes, mais ils n’ont pas encore fait avec M. Cabet un voyage en Icarie. Leurs plans d’association n’ont que le défaut d’être inexécutables à force d’être poussés à l’extrême. Ils ressemblent un peu à l’architecte Dinocrate, qui présenta à Alexandre un plan en vertu duquel le mont Athos aurait été transformé en une ville immense ayant la forme d’un homme. Comme cependant Dino-