Page:Giraud - Hors du siècle, 1897.djvu/14

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Puis entre des soldats, des prêtres en étole,

Dans des flots d’un cortège écarlate de rois,

Il les menait cueillir la palme au Capitole,

Salués des drapeaux, des aigles et des croix.


El le peuple, gardant au fond de ses prunelles

Leurs masques léonins parmi les encensoirs,

Contemplait longuement leurs ombres solennelles

Passer et repasser dans la braise des soirs.


Puisque je n’ai pu vivre en ces siècles magiques,

Puisque mes chers soleils pour d’autres yeux ont lui,

Je m’exile à jamais dans ces vers nostalgiques

Et mon cœur n’attend rien des hommes d’aujourd’hui.


La multitude abjecte est par moi délestée :

Pas un cri de ce temps ne franchira mon seuil ;

Et pour m’ensevelir loin de la foule athée,

Je saurai me construire un monument d’orgueil.


Je travaillerai seul, en un silence austère,

Nourrissant mon esprit des vieilles vérités,

Et je m’endormirai, bouche pleine de terre,

Dans la pourpre des jours que j’ai ressuscités.