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LE FAIBLE BERNARD 167

trouvait humilié, car ce n'était pas la pre- mière fois qu'il essayait de se surprendre un cœur amer et compliqué. Que de fois, auprès de son ancienne amie, il avait cherché à éprouver le malaise, le dégoût qu'annonçait Dolorès. Toujours sans succès. Au début de la liaison, il se méfiait, comme un passager novice se défie du mal de mer, le redoutant mais le taquinant. Chaque jour, à mesure que l'amour et l'habitude l'attiraient avec plus d'ardeur vers Georgette, il croyait découvrir en lui les indices d'une irrésistible répulsion. En vain. Et pourtant Georgette était à égale distance de la perfection et de la laideur. Georgette ressemblerait un jour à sa mère, qui était hideuse. Georgette avait la manie d'envoyer à Bernard des cartes postales 011 elle médisait de la concierge de son ami. Elle appelait les hommes des bou- langers. Nue, elle avait toutes les apparences, grâces et défauts, d'un jeune animal. Elle sautait en voltige sur les fauteuils, s'étendait le ventre au tapis. La fatigue et le sommeil tombaient sur elle à l'improviste, la mar- brant, la craquelant. En vain. Le jour oii il

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