Page:Giraudoux - L’École des indifférents.djvu/197

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LE FAItiLE BERNARD IQù

— Parlez-moi.

— De quoi?

— De ce qui vous plaira. De tout.

— Je ne parle jamais.

On ne pouvait avoir une voix plus émue et plus raisonnable Plein de remords déjà, il se penchait sur elle, il l'étreignait. Il tres- saillit en la voyant pleurer. Elle pleurait les yeux fermés, modestement, de même que tout à l'heure, pour rire, elle avait caché ses lèvres de sa main. Et à nouveau elle ressemblait à une femme illustre. Quelles femmes illustres avait-il donc déjà vu sou- rire, aimer, pleurer.^

Ils revenaient vers le bour^. Des ombres d'oiseaux voletaient sans bruit. La lune invi- sible éclairait la nuit par en-dessous. Bernard, pour la première fois, comprenait qu'il était né pour la campagne et pour la médiocrité. Toutes ses qualités ne lui serviraient jamais. Il était prodigue, mais il était pauvre. Il était complaisant, mais il n'aurait jamais qu'à l'être pour des supérieurs. Il était modeste, mais il n'avait point de talents. Quelles fées s'étaient trompées, au bord de son berceau,

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