Page:Giraudoux - Provinciales.djvu/118

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du petit duc, et tous deux écoutaient monter d’eux-mêmes, comme des coquillages, un bruit confus. Soudain, une large main rafla d’un coup oisillon et canif. Un gamin disparut à l’angle de la maison. Le petit duc interrogeait, de ses yeux déconcertés. Jean murmura, tout pâle :

— C’est Bavouzet.

Il n’en put dire davantage. Le rire de Bavouzet et de tout le patronage éclatait, derrière le mur. Une bande de fillettes passa, silencieuse et guindée, qui grimaça et chanta dès qu’elle se crut hors d’atteinte. Jean choisit des pierres rondes et les leur lança. La plus grande ne voulut pas s’enfuir et, rageuse, soulevant ses jupes, montra des pantalons effilochés. Ce devait être une insulte. Jean, humilié, ne visa plus, et il souriait sans raison au petit duc dont les sourcils se froncèrent. Par bonheur, sept heures sonnaient, l’heure du dîner, et l’on se sépara sans s’embrasser.

— À mercredi, rappela Jean.

Et il était presque heureux qu’on dût se quitter déjà, comme ces fiancés qui, à la veille de leur noce, se disent adieu dès midi pour mieux penser au lendemain. Il revint par la place du Centenaire, afin d’éviter le patronage. La grande