Page:Giraudoux - Provinciales.djvu/127

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mobile de trouver le bourg à la borne indiquée. Jean la suivit, se dissimulant derrière les volets des magasins et la vit s’arrêter devant l’hôtel ; un homme sec, en paletot, tendait des valises au patron. L’enfant reconnut Cambronne, le contrebandier, et courut prévenir son père.

Mais une servante l’avait signalé, et quand il revint à la main de l’employé, il n’y avait plus dans la voiture qu’une seule caisse. On s’attroupait, Bavouzet au premier rang, ricanant, sa toupie à la main comme une fronde. Cambronne protestait et ne se rendait pas ; il exigeait que le père montrât sa plaque, bien qu’il le connût, à l’exemple de ces voyageurs de troisième classe qui exigent du contrôleur qu’il passe des gants pour oblitérer leur billet ; mais Jean, impatient, avait déjà fait sauter le couvercle, et le gibier apparut. Il y avait là onze cailles serrées comme des alouettes, on se demandait ce qu’avait dû devenir la douzième ; des perdrix rouges, de celles qui s’appellent le soir, pour savoir s’il fait nuit partout ; puis quelques-uns de ces canards madrés et balourds, qui parfois, dans les airs, se trompent et, au lieu de voler, nagent, hébétés, de leurs palmes inutiles ; enfin un lièvre, dont le