Page:Giraudoux - Suzanne et le Pacifique, 1925.djvu/175

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et immuable que celui des couleurs du prisme. Mais le septième, ce péché capital que l’on commet sans doute sans arrêt dans la dixième commune de Bellac, résistait à tous ces hameçons que je posais sur mon corps même et que je croyais agiter en remuant un doigt, ou la langue. Car si ce n’est justement ce corps, nul moyen de le retrouver, nul dictionnaire. J’ouvrais les bras, les jambes, le feuilletant au hasard. En vain. Je regardais mon visage dans l’eau, y recherchant le péché comme dans ces gravures où les enfants doivent trouver un poisson sur l’arbre ou un soldat entre les jointures de la fenêtre… En vain. Je m’étudiais dans la loupe, car peut-être sortirait-il de mon image mille fois rapetissée… Je plongeais ma main, ma jambe dans une eau courante qui les allongeait, qui les faisait toutes courtes ou toutes rondes, les soumettant à une torture qui me les rendait seulement plus souples et plus fraîches, lavées même de l’orgueil et de la paresse. Ou bien, de même que j’avais retrouvé le nom de l’indigo, oublié lui aussi, en regardant un arc-en-ciel même, je prenais une journée d’Europe du lever au coucher, assurée qu’il suffirait de la pencher, de la secouer, comme un prisme justement, pour que le péché y apparut. Mais je tombais sur le souvenir d’une journée sanctifiée, où ne