Page:Giraudoux - Suzanne et le Pacifique, 1925.djvu/229

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un miroir que je confonds avec elle, devant ces dalaganpalangs qui ressemblent à une volonté que j’ai, cette colline Bahiki à évidés rouge et noir qui contrefait juste une petite peine que je ressens, ces oiseaux gnanlé qui imitent à s’y méprendre la poussière de pensée qui vole autour de mes pensées, moi la reine, ma perfection soudain m’accable, et je souhaite ce corps maladroit comme il l’était à Bellac, quand il cassait le douzième verre de chaque service, je souhaite mon oreille polluée, je voudrais entendre dire : « causer à quelqu’un, se rappeler de quelque chose » ; entendre madame Blebé appeler ses filles ses demoiselles ; je suis lasse de ces invisibles agrafes qui m’empêchent de tomber des plus hauts arbres, de ces poches d’air en moi qui me maintiennent au fond des eaux ; je voudrais toucher un homme ivre, un typhique, et j’en oublie, quand la nuit vient, d’allumer mes feux de santal et de commander à mon île trop parfumée le clignement qui attirera un jour le navire coureur.

« Seule, Simon ; et pourtant, toutes ces places dans mon corps qui n’étaient sensibles qu’au contact des hommes, je les sens s’irriter. Ce chatouillement dans ma hanche, qui me prenait dès qu’un homme blond chuchotait à mon oreille, c’est maintenant un vrai sens, une vraie cicatrice.