Page:Giraudoux - Suzanne et le Pacifique, 1925.djvu/37

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autres noms, et brusquement, les tramways dans les banlieues : Lakanal, Carnot, Zola ; une fois doublée la grille du cimetière des chiens, à travers laquelle on voit de vieilles dames à fourrure en poil végétal, à boas en plume de palmier, à chaussures en cuir de bananes, terribles pour les végétaux, sarcler des tombes effroyablement inégales, perroquets, éléphants et levrettes y alternant ; une fois franchis tous ces espaces incroyablement ouverts où se commettent cependant tous les crimes ; où l’on sent se mêler, gare de marchandises pour le vide et l’impalpable, les ondes de la télégraphie sans fil, où les méridiens font leurs aiguillages, et, entassés en paquets invisibles, tous ces frets sans corps qui cherchent Paris ; dépassée par les autos dont un gros parvenu à bagues d’or tient le volant, comme les cocottes quand elles boivent, en relevant les deux petits doigts ; les grands panneaux-réclame éclatants ou dépérissants, dans les champs en bordure, selon que leur marque s’enrichit ou fait faillite ; un ruisseau, dans un bas-fond, sur un seul remous apportant vers la guinguette une touffe de ronces, plus fier que le Mississipi ; à la limite de la zone que n’atteignent plus les petits bleus, de tristes villes où l’on fait le savon, toutes parfumées, sans arbres, sans buissons, et où les seuls oiseaux