Page:Glatigny - Œuvres, Lemerre.djvu/129

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.



L’Isolé.


À Émile Montégut.



Comme un satrape lourd, sur sa natte immobile,
Regarde vaguement tout passer près de lui,
Compagnon de mon corps et de ma chair débile,
Ô mon cœur ! tu te plais dans un superbe ennui.

Ne daignant pas mourir et ne voulant plus vivre,
Contemple les lutteurs sans décerner de prix ;
Savoure, quand bien même elles te rendraient ivre,
Les grandes voluptés qui naissent du mépris !

En vain, éparpillant l’or de leurs tresses blondes,
Les filles de plaisir font bondir en dansant
L’éclatante blancheur de leurs mamelles rondes,
Et tordent leurs bras nus dans un air frémissant

Qu’importe ? tu sais bien que ces filles sans âme
Singent d’une façon absurde l’impudeur,
Et ne sauront jamais couvrir le vice infâme
D’un effrayant manteau d’audace et de grandeur.