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L’Isolé.



Quel jour ont-elles su porter leurs fronts profanes
Ainsi qu’il conviendrait aux Phrynés, fièrement ?
Ah ! c’est pitié de voir ces fausses courtisanes
Qui ri osent épuiser les veines d’un amant !

Ce n’était pas ainsi, fougueuse Messaline,
Que tu serrais un homme entre tes bras divins !
Tu ne te faisais pas petite et pateline,
Et tu buvais le sang dans la pourpre des vins !

Alors qu’anéanti par tes âpres caresses,
Ton amant s’éteignait, pâli sous la douleur,
Fatiguée et pourtant avide encor d’ivresses,
Tu pressais longuement ses lèvres sans chaleur !

Laquelle maintenant des lâches hétaïres
Qui se font voir au bois aux bras de nos boursiers
Oserait, sans trembler, songer à ces délires
Qui laissaient pour longtemps les corps suppliciés !

Nulle part la vertu, nulle part la débauche ;
Rien n’est beau, rien n’est grand, rien enfin n’est complet :
Dans un terne milieu, vague, stupide et gauche,
Le monde abâtardi se roule et se complaît.

Les femmes ont traîné dans les vieux vaudevilles
Leurs jupons soulevés sans amour ! Ô dieux bons !
Vous le voyez, toujours au fond des choses viles,
Du haut de nos fumiers infects, nous retombons.