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Page:Glatigny - Œuvres, Lemerre.djvu/201

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Du brouillard, de la neige, et nous dit : « C’est l’hiver !
Tout est fini pour vous, enfants ! » et prend son air
Le plus rébarbatif, tout en riant sous cape
De la mine que font les marmots qu’il attrape.
Mais quand nous le prenons par trop au sérieux,
Quand nous avons vraiment des larmes dans les yeux,
Il ouvre le boudoir frais où la violette
Achève justement sa première toilette,
Et nous dit, en laissant le bouton d’or briller :
« Donnez donc à ces fleurs le temps de s’habiller ! »
Au bois ! au bois ! tant pis, ma foi, si les fleurettes.
Ne nous attendant pas, ne sont point encor prêtes !
Quand les lilas auraient quelques feuilles de moins,
Beau malheur ! À quoi bon prendre ces petits soins ?
     Les poëtes ne sont pas d’humeur exigeante.
Pourvu que d’un rayon de soleil l’eau s’argente,
C’est bien ! et l’horizon en fête resplendit.
Puis, le printemps est né ! Le moineau me l’a dit
En battant, ce matin, de l’aile à ma fenêtre.
Ah ! comme dans les champs nous allons reconnaître,
Mille bons vieux amis dont le salut chantant
Réveille l’herbe au bois et les joncs dans l’étang !
      Pour moi, je veux aller tout seul dans la campagne,
Car je sens que déjà le vertige me gagne,
J’ai besoin de grimper aux arbres, de courir,
De voir joyeusement près de moi tout fleurir !
La présence d’un être animé me torture ;
Un amour bestial me vient pour la nature
Et je veux être seul, tout seul dans la forêt !