Page:Glatigny - Œuvres, Lemerre.djvu/204

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Et j’ai pâli souvent devant le front superbe
D’un vieux marbre doré par les feux de l’été,
Devant un torse aussi dont les mousses et l’herbe
Voilaient aux furieux la blanche austérité.

Mon âme, trop longtemps dans ce monde captive,
Fuyait vers le pays où chante le Mélès,
Parmi les oliviers, près de la mer plaintive,
Respirant l’air qu’avait respiré Périclès.

Rêve de marbre ! Ô songe éblouissant ! poème
De grâce inaltérable et de grave beauté !
Tout ce qui me fait vivre heureux, tout ce que j’aime,
La grande pourpre et l’or par elle reflété !

C’est là tout ce qu’en vous je trouve, ô créature
Impérieuse et noble ! aux gestes nonchalants,
Moins femme que statue, ô vous sur la nature
Posant avec froideur vos pieds souples et blancs !

Car je hais à la mort ces amours turbulentes,
Pleines de cris, de pleurs et de lâches effrois,
Qui germent sur le cœur, pareilles à ces plantes
Qui des rochers marins salissent les parois.

Leurs vains bruits troubleraient la sage symétrie
Du rêve harmonieux où tout est ordonné,
Du rêve dont j’ai fait la seconde patrie
Plus chère mille fois que celle où je suis né.