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Page:Glatigny - Œuvres, Lemerre.djvu/235

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L’Aiguillon.


À Armand Gouzien.


Souvent, las de souffrir, triste, et la mort dans l’âme,
Le poëte renonce à finir son chemin.
Tout est sombre ; l’hiver a fait le ciel sans flamme ;
Son bâton de voyage échappe de sa main.

Sur un morceau de roc, il s’assied. Une pie
Saute à côté de lui dans le champ nu. Là-bas,
Une louve attentive et famélique épie
L’heure où le désespoir va le jeter à bas.

Il a plu dans la nuit et la terre est glissante.
Le vent chargé de haine, avec de sourds frissons,
Siffle d’une façon lugubre et menaçante,
Et rien n’annonce encor les futures moissons.

Dans le brouillard épais et froid où son œil plonge,
Il voit se dessiner les spectres grimaçants
De ce qui fut sa joie aux heures de mensonge
Dont le timbre a, jadis, fait éveiller nos sens.