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Page:Glatigny - Œuvres, Lemerre.djvu/266

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La Chanson ignorée.


Oh ! non, pâle endormie ! oh ! non, morte adorée !
Je ne la dirai pas, la chanson murmurée
En ce Mai de nos cœurs, sous les bois, aux rayons
Des étoiles, moins purs que nos illusions !
Et ni le rossignol qui chante pour la rose,
Ni le calme des nuits à qui souvent je cause,
Ni mon plus cher aminé l’entendront jamais,
Ce chant mystérieux et tendre que j’aimais
À te dire, en ce temps où ta beauté naissante
Rendait les lis jaloux, ô blanche adolescente !
Oh ! non ! et puisque j’ai lâchement répété
Les mots harmonieux d’espoir qu’en cet été
Je te disais à toi, vierge enfantine et douce,
À d’autres dont le cœur sombre et creux me repousse !
Que du moins cet aveu chaste reste entre nous,
Comme à l’heure où, baignant de larmes tes genoux,
Je t’offrais ce trésor de la vingtième année,
Le premier cri d’amour de mon âme étonnée.
Ô charme ! tes regards clairs et silencieux,
Sources vives d’azur réfléchissant mes yeux,
Brillaient sur moi ; tes mains pâles serraient les miennes ;
Tes longues tresses d’or, souples, aériennes,
Rayonnaient ! Et pourtant, ni tes beaux cheveux blonds,
Ni tes petites mains aux doigts frêles et longs,