Page:Glatigny - Œuvres, Lemerre.djvu/93

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Laissons-nous bercer par notre folie ;
À présent du moins, chère, aimons-nous bien,
Car peut-être, un jour, ô mélancolie !
Nous ne serons plus l’un à l’autre rien.

Beaucoup de baisers viendront sur tes lèvres ;
Pour qui seront-ils ? — Je ne le sais pas.
Mais, hélas ! je sais qu’auprès des orfèvres
On te voit souvent ralentir le pas.

Puis il est un dieu qu’on nomme Caprice,
Qui prend pour domaine un coin de nos cœurs,
Un dieu féminin ; il faut qu’il meurtrisse
Des morceaux d’amour en ses jeux moqueurs.

Ah ! ne hâtons pas la saison nouvelle !
Ce dieu, quelque jour, j’en ai grande peur,
Viendra mettre en fair ta jeune cervelle :
Ton amour alors, à toute vapeur,

Ira vers celui qui le sollicite.
Veux-tu le connaître ? — Il en est qui l’ont
Vu parfois venir dans la réussite
Que ton fait le soir, soit brun ou soit blond.

Viens plus près encor, viens que je t’embrasse ;
Restons en Hiver : quand viendra l’Été,
De mes longs baisers où trouver la trace
Sur ton front joyeux, si tu m’as quitté ?