Page:Gobineau - Adelaïde - 1914.djvu/31

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il était convenu qu’on lui pouvait et devait passer beaucoup de choses. Rothbanner objecta à la fantaisie de la dame que sa délicatesse s’opposait absolument à satisfaire le désir exprimé; il était pauvre et il paraîtrait avoir abusé de son influence pour des motifs peu honorables; on le croirait d’autant mieux qu’en définitive une fort grande différence d’âge existait entre lui et la comtesse, et les unions contractées malgré de pareils empêchements donnent toujours à gloser. Ensuite, il était catholique, la comtesse protestante et sa famille à lui, qui passait sur beaucoup de choses, sous le manteau de la cheminée, trouverait certainement à redire et très fort à une sorte de renonciation publique à des principes héréditaires. Enfin, et c’était là son suprême argument, il répéta à satiété qu’il ne voyait pas pourquoi un bonheur si long, si soutenu, si exempt de nuages serait troublé, évidemment troublé, par la manie de changer le bien en mieux.

Tout cela fut bien dit, bien exposé; cependant la comtesse resta ferme dans sa proposition et ne daignant prendre au sérieux qu’une seule des objections, elle s’en alla, un matin, sans rien dire à Frédéric, trouver l’Evêque de B***. Elle fit part au prélat de son désir de se convertir. Le prélat qui n’y entendait pas malice, fut naturellement touché, enchanté. La néophyte avait justement le genre d’esprit qu’elle voulait avoir; elle alla au-devant de toutes les instructions, étourdit les abbés qu’on lui donna pour maîtres par la variété et l’orthodoxie de ses connaissances