Page:Gobineau - Adelaïde - 1914.djvu/33

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— J’entends votre liaison avec ma fille !

— Oh ! madame !

— Avec ma fille ! vous dis-je; nous voilà, enfin, en pleine bonne foi, et c’est ainsi que nous allons nous expliquer.

On peut s’imaginer l’attitude des deux lutteurs; car d’amants, il n’en était pas question dans ce moment-là. Elisabeth pâle de cette pâleur de l’homme de guerre causée uniquement par la rage de vaincre; Frédéric, pâle, mais de la pâleur de l’animal pris dans un piège dont il voit peu de chances de se tirer.

— Monsieur, dit la comtesse, je ne vous ferai pas de reproches; calmez-vous, rassurez-vous. Ce n’est pas moi qui puis être votre juge. J’en ai perdu le droit du moment que j’ai abdiqué toute dignité. C’est moi qui vous ai introduit dans cette maison, qui vous y ai fait régner, qui en vous accablant de tout pouvoir, vous ai donné toute licence. Il est naturel que vous en ayez abusé jusqu’au crime. Oh ! ne vous révoltez pas ! Au point où en sont les choses, si je puis et dois vous épargner les reproches, il est au moins naturel que vous consentiez à envisager la vérité en face. Si elle n’est pas belle, convenez que sur ce point du moins, ce n’est pas à moi qu’il faut s’en prendre. Vous avez trouvé une enfant toute jeune, incapable de rien comprendre, de rien savoir, de rien prévoir... Mais laissons le passé et songeons à l’avenir. Vous et moi nous avons donné tant de scandales au monde que je vous avoue mon impuissance à y