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Pompilius, et même, à une époque assez rapprochée de nous, au temps de Gonsalve de Cordoue ; malheureusement, Niebuhr et Prescott ne se sont pas mis d’accord avec lui pour des questions si intéressantes, et il y aura toujours un doute flottant sur la ressemblance des portraits tracés par l’ancien page du duc de Penthièvre. En somme, et c’est à ce point surtout qu’il faut s’attacher, si mademoiselle Liliane eût personnellement connu Némorin, elle avait des raisons de croire que son âme s’en fût mieux trouvée. Désormais, elle était condamnée à la solitude pour sa vie entière. Elle allait même plus loin ; il ne lui eût pas été désagréable que Némorin se fût appelé, dans le siècle, le lieutenant de Schorn ; mais il n’y fallait plus songer, et Liliane était incapable de fléchir sur une question de principes. Voilà pourquoi elle écrivit son journal jusqu’à une heure du matin.

À ce moment, et comme elle entendait au loin la crécelle du guetteur de nuit crier au sommet de la cathédrale, elle se résigna à chercher le repos. Elle défit ses cheveux, les arrangea, les tordit, les enferma dans leur filet blanc. Elle se coucha, tira le drap jusqu’à son menton et mit sa main gauche sous sa joue. Une petite larme (pauvre petite !) glissa entre ses cils pressés l’un contre l’autre. Elle s’endormit ; c’est pourtant vrai ! Elle s’endormit profondément, et, en voyant comment allaient les choses, son ange gardien descendit du ciel, la regarda quelque temps avec un sourire, tira un peu plus les rideaux sur elle, se pencha, l’embrassa au front et s’envola chez lui, n’ayant rien à faire.

Maintenant que l’on sait comment tout se passe à Burbach, jetons un regard rapide sur ce que Wilfrid Nore et Laudon deviennent à Milan ; ce n’est pas là que nous allons