Page:Gobineau - Les Pléiades, 1874.djvu/175

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Le lecteur de cette épître resta pensif pendant quelques instants. Il était tellement absorbé dans ses méditations, que, certainement, il ne s’apercevait pas du travail de ses doigts. Ce travail consistait à déchirer si menu, si menu, les confidences de sa belle cousine, que le monument de la papeterie moderne s’en alla joncher la terre en atomes. Du reste, les réflexions si profondes de Nore n’avaient peut-être pas pour objet lady Gwendoline. Laudon rappela son ami dans ce bas monde, en s’écriant avec conviction :

— C’est un ange digne d’être adorée !

— Qui cela ? dit Nore.

— Madame Gennevilliers, repartit Louis en lui montrant la lettre dont lui-même venait d’achever la lecture.

— Voulez-vous me permettre de vous lire ce que l’esprit peut avoir de plus délicat, le cœur de plus aimable ?

— On ne refuse pas de pareilles bonnes fortunes, répliqua Wilfrid. Je vous écoute.

— Voici ce que m’écrit cette ravissante femme, murmura Laudon :

« Monsieur,

« Vous nous manquez véritablement. M. de Gennevilliers ne sait plus à qui parler et je n’ai personne pour nous aider à choisir nos promenades. Nous parlons de vous et cela nous console. M. de Gennevilliers prétend que si vous voulez suivre ses conseils, il répond de votre avenir. Faites-le donc. Vous savez combien nous aurons de plaisir à vous voir dans le monde, y occupant la place à laquelle vous avez droit. Un homme dans votre position est fait pour rendre les plus grands services à la société, et ce n’est pas vous, assurément, qui