sons tout à fait indignes de lui. Ce fut d’abord une petite bourgeoise de Burbach, une mademoiselle Caroline Schmidt, aujourd’hui mariée à un riche industriel ; ensuite vint une actrice extravagante, mademoiselle Lippold, à laquelle il trouvait du génie ; enfin, une marquise Coppoli, intrigante au suprême degré, peu jolie et sans l’ombre d’une qualité. J’ai voulu le tirer de cet abîme… Ne faites jamais le bien, ma chère, ne le faites jamais !… si vous avez peur de souffrir !
En prononçant ces paroles, madame Tonska adressa au ciel un regard de reproche et serra la main de son amie, puis elle continua :
— Le prince ne put se tenir de devenir amoureux de moi. Je vous l’ai dit, il est séduisant, éloquent, aimable, autant que ce mot a de sens. J’eus la faiblesse de lui permettre de me tout avouer, à condition qu’il ne demanderait jamais de retour. Il me le promit et ne put tenir parole. Il était exigeant, il était jaloux ; des scènes continuelles me jetaient dans le plus affreux désespoir, et moi qui n’ai besoin que de repos et qui ne saurais vivre dans une atmosphère agitée, je dus perdre jusqu’à l’espérance de passer un seul jour sans querelle. J’aurais voulu le rendre heureux ; j’aurais voulu surtout éclairer sa belle intelligence constamment obscurcie par les théories vaines et fausses de ministres sans portée, de conseillers indignes. Je passais mes jours à le supplier d’étudier les droits des classes souffrantes, à abandonner des errements vieillis, à se mettre à la tête des réformes, à guider, pendant qu’il en était temps encore, les foules toutes disposées à marcher derrière lui, mais aussi à le renverser s’il résistait ; il m’était impossible de maîtriser son attention. Il me peignait dans des discours insensés l’excès de ses sentiments pour moi, il se frappait la tête, il se mettait à