Page:Gobineau - Mademoiselle Irnois - 1920.djvu/76

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À ce moment, le jeune homme était assis sur le rebord de sa fenêtre, jambe de ci, jambe de là, occupé à brosser, avec une délicate attention, sa casquette de dimanche. Tout à coup, à un signe de tête, accompagné d’un sourire qu’il adressa au fond de sa chambre, Emmelina put comprendre que quelqu’un entrait, quelqu’un d’ami en vérité, car l’ouvrier ne se dérangea pas autrement. Au contraire, il se mit à brosser sa casquette avec plus d’entrain qu’auparavant, et même, quand la casquette eut atteint son plus haut degré de lustre, il attira à lui un habit qui sans doute, était posé sur une chaise dans l’intérieur de la chambre, et fit subir à cet ornement futur de son corps la même opération dont il venait de faire les frais pour l’ornement de sa tête.

Ces menus détails ne sont rien pour le lecteur, et pas davantage pour l’auteur de ce récit, on peut le croire ! Mais ils faisaient toute la vie d’Emmelina.

L’ouvrier en était peut-être à son dixième coup de brosse sur la manche de son habit, et au mouvement de ses lèvres, on voyait qu’il causait et riait avec la personne qui était entrée dans la chambre, quand cette personne apparut à son tour aux yeux d’Emmelina.

C’était une jeune fille assez jolie, une grisette. Elle était gentiment atournée comme pour une partie de plaisir. Son bonnet étalait une magnificence luxuriante de rubans roses dont la teinte assez vive luttait sans désavantage avec la couleur relevée de ses joues. Cette bonne fille riait du meilleur rire, ce qui peut donner à croire également que la conversation avec l’ouvrier était fort