Page:Gobineau - Nouvelles asiatiques 1876.djvu/143

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fasse des choses grandes et puissantes sous la protection de l’Indien, que si, par exemple, il s’en allait à la guerre, où même la faveur du roi (que sa grandeur augmente et soit fortifiée !) ne pourrait jamais l’empêcher de recevoir un mauvais coup.

Ce genre de consolation prodigué par Zemroud à sa petite belle-sœur valait beaucoup ou valait peu, il n’importe. Elle n’en avait pas d’autre à sa disposition, et elle en usa tant qu’elle put, le reproduisant sous toutes les formes et terminant toujours chaque démonstration par l’assurance ferme, par la promesse sous serment que Kassem ne resterait, dans tous les cas, pas plus d’un an absent, et qu’il n’était que raisonnable et naturel d’admettre qu’il reviendrait possesseur d’une fortune immense qui les mettrait, tous et toutes dans la famille, en situation de se passer leurs fantaisies. À la fin, Amynèh, ayant un peu pris sur elle, dit qu’elle voulait s’en aller et elle retourna au logis.

Elle y trouva Kassem dans un état qui ne valait guère mieux que le sien. Au moment de quitter sa femme, sa maison, ses habitudes, son bonheur, son amour, l’enthousiasme avait baissé. La résolution restait, parce qu’il ne pouvait l’arracher ni de son imagination ni de sa volonté ; mais elle était voilée de noir, et le cœur s’en donnait tant et plus de se tordre, de se plaindre, de gémir, de réclamer ; enfin, pour bien dire, Kassem était très-malheureux, comme on