Page:Gobineau - Nouvelles asiatiques 1876.djvu/186

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pas de motifs analogues à ceux du pishkedmêt pour s’inquiéter de sa réputation. Il put donc, sans distraction, laisser son imagination s’allumer sur les promesses qu’il venait de recevoir, et, la tête pleine de feux d’artifices éblouissants, saturée des splendeurs qui allaient naître, il arriva à la maison paternelle dans la plus belle humeur du monde. Tous les chiens errants du quartier le connaissaient et ne faisaient aucune démonstration hostile contre ses jambes. Les gardiens de nuit, étendus sous les auvents des boutiques, levaient la tête à son approche et le laissaient passer sans le questionner. Il se glissa ainsi dans sa demeure.

Là, bien que la nuit fût avancée, il trouva ses dignes parents en face d’un flacon d’eau-de-vie et d’un agneau rôti auquel il manquait une bonne quantité de chair déjà consommée. Bibi-Djànèm jouait de la mandoline, et Mirza-Hassan-Khan, ayant ôté son habit et son chapeau, la tête rasée de huit jours et la barbe à moitié peinte en noir avec un pouce de blanc à la racine, frappait avec enthousiasme sur un tambourin. Les deux époux, les yeux blancs d’extase, chantaient à pleine voix de tête :

« Mon cyprès, ma tulipe, enivrons-nous de l’amour divin ! »

Gambèr-Aly s’arrêta respectueusement devant le seuil de la chambre et salua les auteurs de ses jours. Il avait, plus que jamais, la main droite sur le pom-