Page:Gobineau - Nouvelles asiatiques 1876.djvu/205

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des charbons, disposa du sucre, atteignit la boîte à thé, alluma le kaliân, l’offrit à son hôte et, après s’être informé des nouvelles de son illustre santé et avoir rendu grâces au ciel de ce que tout allait bien de ce côté, il entama la conversation ainsi :

— Vous êtes un jeune homme si parfaitement accompli et orné des dons du ciel, que je n’hésite pas à vous dire toute la vérité, et puisse la malédiction et la damnation tomber sur moi, si je m’écarte d’une ligne de la sincérité la plus parfaite, soit à droite, soit à gauche. Je vais vous payer à l’instant, seulement je ne sais pas comment faire, parce que je n’ai pas le sou.

— Que votre bonté ne diminue pas ! répondit froidement Gambèr-Aly, en lui passant le kaliân ; mais je ne suis pas autorisé par mon vénérable chef à entendre de pareils discours, et il me faut de l’argent. Si vous ne me le donnez pas, vous savez ce qui arrivera : je brûlerai votre grand-père et le grand-père de votre grand-père, lui-même !

Cette menace parut agir fortement sur le vieil écrivain qui, probablement, ne se souciait pas d’un tel dégât parmi ses ascendants. Il s’écria alors d’une voix lamentable :

— Il n’y a plus d’Islam ! il n’y a plus de religion ! Où trouverai-je un protecteur, puisque cette figure de houri, cette pleine lune de toutes les qualités, me regarde sans bienveillance ? Si je vous offrais hum-