Page:Gobineau - Nouvelles asiatiques 1876.djvu/217

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— Que votre bonté ne diminue pas ! repartît Gambèr-Aly. Oserais-je vous demander votre noble nom ?

— Je m’appelle Moussa-Riza, répliqua l’étranger d’un air assuré ; je suis européen et même français, et on me nomme, parmi mes compatriotes, M. Brichard. Mais j’ai embrassé l’Islamisme, par la grâce de Dieu, pour arranger quelques petites affaires que j’avais en souffrance, et le ministre de ma nation a l’indignité de vouloir me faire sortir de Perse. Je reste donc ici, afin de ne pas tomber dans ses mains, et je fais des miracles pour prouver la grandeur de notre auguste religion.

— Que la bénédiction soit sur vous ! dit Gambèr-Aly dévotement ; mais il prit peur de cet Européen défroqué et se résolut à le surveiller exactement. La visite du préposé à la mosquée, qui eut lieu dans la matinée, lui fut plus agréable ; on lui donna à manger, on lui promit pour tous les jours un bon ordinaire fondé sur les dotations du lieu, et on lui garantit que personne ne s’aviserait de le tourmenter dans le sanctuaire vénérable où il avait eu le bonheur de se retirer. On voulut même lui persuader de ne pas se confiner à l’intérieur de la mosquée ; il pouvait, sans crainte, vaguer à son aise dans les cours, fût-ce à la barbe du chef de police ; mais il n’entendit pas de cette oreille. En vain les réfugiés, assez nombreux habitants de cette partie plus vaste du territoire consacré et