Page:Gobineau - Nouvelles asiatiques 1876.djvu/30

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pas laisser à jamais les Mahométans uniques possesseurs de ces trésors. Nos troupes impériales attaquèrent Shamakha, comme elles avaient fait des autres résidences des souverains du pays. La résistance des infidèles fut vive, et, au moment de succomber, la fureur les prit. Afin de ne pas voir les Russes heureux à leur tour, ils résolurent d’exécuter un massacre général de toutes les danseuses.

— Voilà une de ces infamies qui finiraient par me faire embrasser ta religion, si elles devaient se répéter souvent ! interrompit Assanoff.

— Mais le massacre ne fut pas complet.

— Ah ! tant mieux !

— Les régiments russes enlevèrent la place d’assaut, au moment où la tuerie commençait. C’était un spectacle affreux ; la brèche béante donnait passage à des flots de soldats ; ceux-ci s’empressaient de faire main-basse sur les défenseurs de la ville, enragés à ne pas reculer d’un pouce. À leur grand étonnement, nos hommes trouvaient çà et là des cadavres de jeunes filles richement parées de gazes rouges et bleues, pailletées d’or et d’argent, couvertes de joyaux et jetées sur le pavé, dans leur sang. En gagnant plus avant l’intérieur des rues, ils aperçurent des groupes nombreux de ces victimes encore vivantes ; les Musulmans les poussaient à coups de sabre. Alors ils se jetèrent plus hardiment au milieu de la bagarre, et c’est ainsi que, lorsque toute résistance eut cessé, on se trouva