Page:Gobineau - Nouvelles asiatiques 1876.djvu/352

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tout à l’heure ; lui, parti, nous péririons plus sûrement. Sauvez-nous !

La dame ne répondit rien, mais regarda son mari d’un air suppliant, et les deux jeunes femmes en firent de même, l’une pour son père et son frère, l’autre pour son mari. Mais Abdoullah-Khan fronça le sourcil, et, s’asseyant dans un angle du salon, laissa tomber ces paroles amères :

— Que signifient ces folles équipées ? Eh ! depuis quand un Afghan, un noble, est-il tellement égaré par la peur, qu’il ne se croie pas en sûreté suffisante quand il est chez moi ? Du moment que mon fils vous protège, qu’avez-vous à réclamer davantage ? Qui vous aurait osé toucher ?

— Vous ! repartit Mohsèn en le regardant entre les deux yeux.

— Moi ? s’écria le vieux chef.

Il secoua la tête avec dédain et continua :

— Vous êtes fou ! mais comme l’irréflexion ne saurait servir d’excuse pour une témérité telle que la vôtre, vous serez châtié.

Et Abdoullah-Khan fit le signe de frapper dans ses mains pour appeler ses gens. Mais, Mohsèn, s’adressant de nouveau à la dame âgée, lui dit :

— Votre époux ne me touchera pas ! Il ne me fera ni châtier, ni insulter, vous me garderez de lui, madame ; je suis Mohsèn, fils de Mohammed, Ahmedzyy, et celle-ci est ma cousine, fille de mon oncle Osman ;