Page:Gobineau - Nouvelles asiatiques 1876.djvu/374

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avait le plaisir de donner un rude coup à une partie, sinon à la totalité, des Ahmedzyys, en facilitant la fuite de ses protégés ; il comptait ne jamais avouer la part qu’il y avait eue, et son fils Akbar serait seul compromis. Pendant quelques jours, le Prince aurait de l’humeur, puis un cadeau l’apaiserait, et Akbar resterait en faveur. Mais ces combinaisons manquaient ; Abdoullah-Khan avait en face de lui une affaire d’État ; le Prince, quand il allait savoir la vérité, deviendrait à craindre. Il fallait prendre un parti. Abdoullah-Khan le prit sur le champ.

Jusqu’alors il n’avait nullement mis en question l’extradition des deux enfants ; seulement il avait bataillé et épluché des minuties sur la façon dont l’extradition aurait lieu, mettant en avant sans cesse les intérêts de sa considération, et se montrant tellement méticuleux que, au milieu des discours, deux grandes heures s’étaient perdues. Comme le Prince ne rencontrait pas de résistance de la part de son favori, et que, d’ailleurs, l’entretien, poussé par instants sur le terrain de la plaisanterie, lui procurait une distraction agréable, il ne s’impatientait pas ; il lui était fort indifférent que Mohsèn et Djemylèh tombassent dans les mains de leur juge une demi-heure plus tôt ou plus tard. À la fin, cependant, on était convenu qu’Abdoullah-Khan remettrait purement et simplement les coupables aux mains du Prince, sans s’informer de ce que Son Altesse comptait en faire, et