Page:Gobineau - Nouvelles asiatiques 1876.djvu/46

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ce que nous le croyons. Cette femme là doit peser… Qu’est-ce qu’elle ne pèse pas ? Désormais, on ne veut plus que des femmes minces, et on appelle cela avoir l’air distingué. Je suis sûr que les Splendeurs de la Beauté ne rapporterait pas deux cents ducats et elle en voudrait garder au moins la moitié, si non plus. Ce n’est pas ce que j’appellerais une opération. Non, ne me prête pas d’idées ridicules. Je n’ai pas songé une minute aux Splendeurs de la Beauté : à Omm-Djéhâne, je ne dis pas ! Elle n’est pas jolie ; mais elle parle français et russe. Il faudrait lui faire une remise assez forte ; mais, comme nous n’avons pas eu avec elle de frais d’éducation, de nourriture, ni d’entretien, on s’en tirerait. J’ai justement rencontré à Poti un marchand de loupes d’arbres, Français, qui m’a assuré connaître à Trébizonde un ancien Kaïmakam retiré, occupé à rechercher une femme bien élevée, il la veut musulmane afin de s’épargner les ennuis de la conversion. Omm-Djéhâne, ce me semble, conviendrait parfaitement à cette occasion-ci.

— Omm-Djéhâne sera l’affaire de ton Kaïmakam, s’il est l’affaire d’Omm-Djéhâne, répondit le maître de police sententieusement. Parles-en aux Splendeurs de la Beauté. Tu entendras son avis.

Sur ce dernier mot, les associés se séparèrent ; mais ici une remarque doit trouver sa place. On aurait tort de croire dans l’Ennemi de l’Esprit quelque disciple des traîtres de mélodrame, ou simplement un homme