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Page:Gobineau - Scaramouche - 1922. djvu.djvu/80

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l’argent, je n’en ai point, attendu que mon oncle se méfie de l’usage que j’en pourrais faire, et je ne puis m’enfuir assez loin pour ne pas être reprise, si je n’ai quelque bonne somme.

— Qu’à cela ne tienne, reprit Matteo, venez avec nous, nous vous cacherons.

— J’y ai pensé, mon digne Scaramouche ; mais, décidément, votre Colombine me déplaît et je ne serais pas en sûreté parmi vous. Décidément j’épouserai le comte, puisque lui seul peut me donner de l’argent pour ma fuite.

Foscari tomba aux genoux de la belle Paula et jura par tous les saints du Paradis qu’elle se méprenait sur ses intentions, qu’il l’adorait en toute conscience et qu’il faudrait bien qu’elle en restât convaincue. Pour Scaramouche, voyant qu’il n’avait rien à faire dans ce boudoir et qu’il lui fallait de toute nécessité empêcher la fuite des deux amants, il souhaita le bonsoir à la compagnie, repassa par la fenêtre et, quand il se trouva seul dans le parc, il réfléchit profondément à ce qu’il convenait de faire. Avertir don Geronimo, c’était retarder l’événement, mais point l’empêcher. Le gentilhomme, fidèle à son culte pour le nom que portait dona Paula, aurait cherché de mille façons à étouffer tout scandale ; Foscari, éloigné pendant quelques jours, serait revenu ferme dans son projet ; Paula l’aurait attendu et l’enlèvement, tenté une seconde fois, aurait réussi. Décidément, Matteo ne vit qu’une seule chose à faire, et cette chose était de s’emparer lui-même de dona Paula.