Page:Gobineau - Souvenirs de voyage. Cephalonie, Naxie, et Terre-Neuve , 1872.djvu/136

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curieux de voir la sensation qui allait se peindre sur ce charmant visage.

Son espérance ne fut pas trompée. L’effet produit fut instantané et sublime. Une admiration profonde se marqua dans les beaux traits qu’il examinait avec passion ; Akrivie parut grandir devant la merveille offerte à sa vue. Rien de mesquin, aucune curiosité banale, aucune prétention maladroite d’émotion factice, aucune exclamation niaisement admiratrice ne sortit de ces belles lèvres serrées. Tout fut sincère, franc, comme la cause de l’émotion était elle-même digne de l’inspirer. Il ne se peut rien voir, en effet, de plus complètement beau que le spectacle qui s’étala bientôt dans toute sa magnificence aux yeux des spectateurs de l’Aurora.

L’obscurité empêchait d’apercevoir les terres de Santorin et des îlots avoisinants, ou du moins son voile les enveloppait si bien, qu’à peine s’estompaient-elles légèrement au milieu des flots, et sur ce fond de même nuance doucement sombre s’élevait majestueusement, pareil à une théophanie et entouré d’un limbe lumineux, le cône immense d’une montagne