Page:Gobineau - Souvenirs de voyage. Cephalonie, Naxie, et Terre-Neuve , 1872.djvu/135

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qu’elle avait une nuance de délicatesse et d’enthousiasme dans tout ce qu’elle expliquait ; elle ne savait pas grand-chose, et pour mieux dire elle ne savait rien, mais elle sentait bien et avec justesse, et son langage était rempli d’observations qui faisaient sourire quelquefois, mais qui plaisaient singulièrement. Elle n’allait pas chercher les petites choses ; elle courait au-devant des grandes, et ne les comprenant pas toujours, elle les regardait volontiers. Norton la comparait de plus en plus aux généreuses filles de Priam, que le soin de conduire un cheval à l’abreuvoir ou de mêler le vin et l’eau dans les amphores n’humiliait nullement. Cette disposition de la fille de Naxos à s’exalter pour les choses belles ou qui lui apparaissaient telles, eut une occasion naturelle de s’exercer vers le soir du lendemain. La nuit était venue, et l’air relativement obscur, bien que pénétré de la lueur générale des étoiles, étendait sur la mer une teinte bleue d’une douceur uniforme, quand on vit poindre à l’horizon une clarté rouge comme le sang.

« Voilà le volcan de Santorin ! » dit Norton en étendant le bras, et il regarda la jeune fille,