Page:Gobineau - Souvenirs de voyage. Cephalonie, Naxie, et Terre-Neuve , 1872.djvu/138

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matière. Les uns partaient des flancs de la base, des pieds cachés de la montagne ; les autres semblaient siffler dans le sommet. Tout ce spectacle était terrible comme la puissance de Jupiter ; mais si fort, si grand, si imposant, si sérieux, qu’il commandait la vénération et non la crainte. Akrivie passa la moitié de la nuit sur le bastingage, ne pouvant se détacher des émotions qui la saisissaient si puissamment. Elle ne tarissait pas en questions sur les causes du phénomène, sur ses effets probables. Norton lui expliquait tout de son mieux et cherchait à lui rendre compréhensibles les résultats les plus simples des théories scientifiques : Il n’y parvenait guère, et il s’aperçut bientôt qu’Akrivie accueillait avec quelque dédain l’exposition des causes trop misérablement disproportionnées, trop humbles pour convenir aux impressions extrêmes dont son âme était possédée. Il démêla sans peine qu’elle aurait cru beaucoup plus volontiers à ses discours s’il lui avait parlé de géants coupables ensevelis sous les eaux afin d’expier leurs crimes, et soufflant leur désespoir, ou de dieux en travail pour étonner l’univers. Probablement, comme bonne