Page:Gobineau - Souvenirs de voyage. Cephalonie, Naxie, et Terre-Neuve , 1872.djvu/63

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vancer avec lenteur vers cette rive hospitalière, quand survint un incident sur lequel on ne comptait pas, et qui faillit changer du tout au tout le caractère paisible de cette arrivée.

Au moment même où la corvette franchissait l’entrée du port, une vive bouffée de brise accourut du large et se jeta étourdiment au travers des voiles, grandes ouvertes au peu d’air qui avait soufflé jusqu’alors. Le navire affolé prit sa course, et comme il n’était pas à trois cents mètres de la côte rocailleuse, il allait inévitablement s’y briser, quand le commandant donna rapidement un ordre. L’équipage entier sauta sur le pont, du pont sur les vergues ; l’action s’exécuta de façon si prompte, que des douzaines de bonnets et de chapeaux s’envolèrent et vinrent parsemer la mer ; mais la moindre toile fut carguée en un instant et l’Aurora s’arrêta subitement, pas assez tôt toutefois pour qu’une petite partie de son bordage n’eût labouré la pierre ; néanmoins ce n’était pas, à proprement parler, une avarie, ce dont chacun se félicita ; et quand on eut constaté que le péril évité ne laissait derrière lui qu’une quasi-nécessité de s’arrêter à Naxie