Page:Gobineau Essai inegalite races 1884 Vol 1.djvu/438

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elle. Ils formèrent la base de tribus nombreuses qui devinrent étrangères à la nationalité hindoue.

Telle est la classification sur laquelle les successeurs des purohitas imaginèrent de construire leur état social. Avant d’en juger les conséquences et le succès, avant, surtout, de nous arrêter devant la subtilité, les ressources inouïes, l’énergie soutenue, l’irrésistible patience employées par les brahmanes pour défendre leur ouvrage, il est indispensable de l’envisager à un point de vue général.

Au point de vue ethnographique, le système avait pour premier et grand tort de reposer sur une fiction. Les brahmanes n’étaient pas et ne pouvaient être les plus authentiques Arians, à l’exclusion de telles familles de kschattryas et de vayçias dont la pureté n’était peut-être pas contestable, mais qui, par la position qu’elles occupaient dans la société, la mesure de leurs ressources, se voyaient forcément désignées pour tenir tel rang et non tel autre. Je suppose, d’autre part, que les illustres races des Gautama et des Atri aient compté dans leur arbre généalogique plusieurs aïeules issues de pères guerriers à une époque où ces alliances étaient légales, et que, de plus, ces aïeules aient eu, dans leur sang, une quantité plus ou moins grande d’alliage mélanien : voilà les Gautama, voilà les Atri reconnus métis. En sont-ils moins possesseurs des hymnes sacrés composés par leurs ancêtres ? Ne remplissent-ils pas auprès de rois puissants les fonctions de sacerdoces révérés ? Puissants ! ne le sont-ils pas eux-mêmes ? Ils comptent parmi les coryphées du nouveau parti, et il ne faut pas s’attendre à ce que, faisant un retour sur leur propre extraction, dont peut-être, d’ailleurs, ils ignorent le vice, ils s’excluent volontairement de la caste suprême.

Toutefois, s’il s’agissait de n’examiner les choses qu’à travers les notions hindoues, on pourrait répondre qu’aussitôt que, par des mariages exclusifs, les races spéciales des brahmanes, des kschattryas, des vayçias eurent été fixées, la gradation, d’abord supposée, quant à la pureté relative, devint bientôt réelle ; que les brahmanes se trouvèrent être plus blancs que les kschattryas, ceux-ci que les hommes de la