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pacifiques (1)[1], auraient donné également des détails plus minutieux et plus exacts sur des faits aussi frappants que ceux dont les monuments tchoudes proclament l’existence. Il ne me paraît donc nullement possible qu’au VIe siècle avant J.-C. tout le centre de l’Asie ait été la possession d’un grand peuple cultivé, s’étendant du Iénisséi à l’Amour, dont ni les Chinois, ni les Grecs, ni les Perses, ni les Hindous n’auraient jamais eu ni vent ni nouvelles, tous persuadés, au contraire, à l’exception des premiers, qui ont le privilège de ne rêver à rien, qu’il fallait peupler ces régions inconnues de créatures à moitié mythologiques.

Si l’on ne peut pas accorder de telles œuvres au temps d’Hérodote, comme il n’est pas possible non plus de les reporter, après lui, à l’époque d’Alexandre, par exemple, où ce prince, s’étant avancé jusqu’à l’extrémité de la Sogdiane, n’aurait rien appris des merveilles du nord, ce qui est inadmissible, il faut, de toute nécessité, se plonger intrépidement dans ce que l’antiquité a de plus reculé, de plus noir, de plus ténébreux, et ne pas hésiter à voir dans les contrées sibériennes le séjour primitif de l’espèce blanche, alors que les nations diverses de cette race, réunies et civilisées, occupaient des demeures voisines les unes des autres, alors qu’elles n’avaient pas encore de motifs de quitter leur patrie, et de s’éparpiller pour aller en chercher une autre au loin.

Tout ce qu’on a exhumé des tombeaux et des ruines tchoudes ou daouriennes confirme ce sentiment. Les squelettes sont toujours ou presque toujours accompagnés de têtes de chevaux. On observe à côté d’eux une selle, une bride, des étriers, des monnaies marquées d’une rose, des miroirs de cuivre, rencontre si commune parmi les reliques chinoises et étrusques, si fréquente encore sous les yourtes tongouses où ces instruments servent aux opérations magiques. Ils se trouvent abondamment dans les plus pauvres tombeaux daouriens (2)[2]. Chose



(1) Hérodote, IV, 23.

(2) Chez les Bouriates, il est peu de tentes où l’on ne rencontre de ces sortes de miroirs suspendus aux piliers. Le lama s’en sert en y faisant refléter l’image du Bouddha ; puis il verse dessus de l’eau qui, coulant de là dans un vase, est censée emporter l’image divine et devient consacrée. (Ritter, Erdkunde, Asien, t. II, p. 119-120.)

  1. (1) Hérodote, IV, 23.
  2. (2) Chez les Bouriates, il est peu de tentes où l’on ne rencontre de ces sortes de miroirs suspendus aux piliers. Le lama s’en sert en y faisant