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de gnome, se présente l’expression celtique de fad. Les Galls appelaient ainsi l’homme ou la femme qu’ils considéraient comme inspirés (1)[1]. C’est le vates des peuples italiotes, et, par dérivation, c’est aussi cette puissance occulte dont les devins avaient le pouvoir de pénétrer les secrets, fatum (2)[2]. Une telle identification originelle des deux mots n’est d’ailleurs point facultative. Fad, devenu aujourd’hui, dans le patois du pays de Vaud, fatha ou fada, dans le dialecte savoyard du Chablais fihes, dans le genevois faye, dans le français fée, dans le berrichon fadet, au féminin fadette, dans le marseillais fada, désigne partout un homme ou une femme élevés au-dessus du niveau commun par des dons surnaturels, et rabaissés au-dessous de ce même niveau par la faiblesse de la raison. Le fada, le fadet est tout à la fois sorcier et idiot, un être fatal.

En suivant cette trace, on trouve les mêmes notions réunies sur le même être, sous une autre forme lexicologique, chez les races blanches aborigènes de l’Italie. C’est faunus, au féminin fauna. Il y a longtemps déjà que les érudits ont remarqué comme une singularité que ces divinités sont à la fois une et multiples, faunus et fauni, faune et les faunes, et, plus encore, que le nom de la déesse est identique à celui de son mari, circonstance dont, en effet, la mythologie classique n’offre peut-être pas un second exemple. D’autre explication n’est pas possible que d’admettre qu’il s’agit ici, non pas de dénomination de personnes, mais d’appellations génériques ou nationales. Faune et les faunes ont, en Grèce, leurs pareils dans Pan et les pans, les ægipans, transformation facile à expliquer d’un même mot. La permutation du p et de l’f est trop fréquente pour qu’il soit nécessaire de la justifier.

Le faune aussi bien que le pan étaient des êtres grotesques par leur laideur, touchant de près à l’animalité, ivrognes, débauchés, cruels, grossiers de toute façon, mais connaissant



(1) Mémoires et documents publiés par la Société d’histoire et d’archéologie de Genève, t. V, p. 496.

(2) Le nom des fées en italien, fata, s’y rapporte étroitement. Il en est probablement de même de l’espagnol hada.

  1. (1) Mémoires et documents publiés par la Société d’histoire et d’archéologie de Genève, t. V, p. 496.
  2. (2) Le nom des fées en italien, fata, s’y rapporte étroitement. Il en est probablement de même de l’espagnol hada.