Page:Gobineau Essai inegalite races 1884 Vol 2.djvu/359

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l’infatuaient pas. Lorsque le dictateur, avant d’en venir aux mains avec lui, cherche à l’étudier et, dans une négociation astucieuse, tente de discuter son droit à s’introduire dans les Gaules, il répond pertinemment que ce droit est égal et tout pareil à celui du Romain lui-même, qu’il est venu, comme lui, appelé par les peuples du pays, et pour intervenir dans leurs discordes. Il maintient sa position d’arbitre légitime  ; puis, déchirant avec fierté les voiles hypocrites dont son compétiteur cherche à envelopper et à cacher le fond sérieux de la situation : « Il ne s’agit, dit-il, ni pour toi ni pour moi, de protéger les cités gauloises, ni d’arranger leurs débats, en pacificateurs désintéressés. Nous voulons, l’un et l’autre, les asservir. »

En parlant ainsi, il pose le débat sur son véritable terrain et se déclare digne de disputer la proie. Il connaît bien les affaires de la contrée, les partis qui la divisent, les passions, les intérêts de ceux-ci. Il parle le gaulois avec autant de facilité que sa propre langue. Bref, ce n’est pas plus un barbare par ses habitudes qu’un subalterne par son intelligence.

Il fut vaincu. Le sort prononça contre lui, contre son armée, mais non pas, on le sait, contre sa race. Ses hommes, qui n’appartenaient à aucune des nations riveraines du Rhin, se dispersèrent. Ceux que César, ébloui de leur valeur, ne put prendre à son service, allèrent se mêler, sans bruit, aux tribus mixtes qui couvraient derrière eux le terrain. Ils apportèrent de nouveaux éléments à leur génie martial.

C’étaient eux, bien qu’ils ne fussent pas une nation, mais seulement une armée (1)[1], qui avaient fait connaître les premiers dans l’Occident le nom des Germains. C’était d’après la plus ou moins grande ressemblance que les Trévires, les Boïens, les Suèves, les Nerviens avaient avec eux, soit dans l’apparence corporelle, soit dans les mœurs et le courage, que César avait accordé à ceux-ci l’honneur de leur trouver


(1) Arioviste dit à César que depuis quatorze ans, que ses campagnes dans la Gaule avaient commencé, ni lui ni ses hommes n’avaient dormi sous un toit. Cette remarque indique bien la situation absolument militaire des gens de ce chef.


  1. (1) Arioviste dit à César que depuis quatorze ans, que ses campagnes dans la Gaule avaient commencé, ni lui ni ses hommes n’avaient dormi sous un toit. Cette remarque indique bien la situation absolument militaire des gens de ce chef.