Page:Gobineau Essai inegalite races 1884 Vol 2.djvu/537

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viennent déjà les envahisseurs prédestinés ; ils montrent les Anglo-Saxons des États-Unis d’Amérique. Ce nom d’ Anglo-Saxons paraît flatter l’imagination des habitants de la grande confédération transatlantique ; malgré le droit de plus en plus équivoque que la population actuelle peut avoir à le réclamer, commençons par le lui donner un moment, ne serait-ce que pour faciliter l’examen des premiers temps de l’agrégation dont les colons anglais forment le noyau.

Ces Anglo-Saxons, ces gens d’origine britannique, représentent la nuance la plus éloignée tout à la fois du sang des aborigènes et de celui des nègres d’Afrique. Ce n’est pas qu’on ne pût trouver dans leur essence quelques traces d’affinités finniques ; mais elles sont contre-balancées par la nature germanique, à la vérité ossifiée, un peu flétrie, dépouillée de ses côtés grandioses, toutefois encore rigide et vigoureuse, qui survit en leur organisme. Ce sont donc, pour les représentants purs ou métis des deux grandes variétés inférieures de l’espèce, des antagonistes irréconciliables. Voilà leur situation sur leur propre territoire. A l’égard des autres contrées indépendantes de l’Amérique, ils composent un État fort en face d’États agonisants. Ces derniers, au lieu d’opposer à l’Union américaine, au défaut d’une organisation ethnique quelque peu compacte, au moins une certaine expérience de la civilisation, et l’énergie apparente ou transitoire d’un gouvernement despotique, ne possèdent que l’anarchie à tous les degrés  ; et quelle anarchie, puisqu’elle réunit les disparates de l’Amérique malaise à ceux de l’Europe romanisée !

Le noyau anglo-saxon existant aux États-Unis n’a donc nulle peine à se faire reconnaître pour l’élément vivace du nouveau continent. Il est placé, vis-à-vis des autres populations, dans cette attitude de supériorité accablante où furent jadis toutes les branches de la famille ariane, Hindous, Kchattryas Chinois, Iraniens, Sarmates, Scandinaves, Germains, à l’égard des multitudes métisses. Bien que ce dernier représentant de la grande race soit fortement déchu, il offre cependant un tableau assez curieux des sentiments de celle-ci pour le reste de l’humanité. Les Anglo-Saxons se comportent en maîtres envers