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Page:Godard d’Aucour - Thémidore, 1908.djvu/104

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Je ne lui cachai rien, il apprit en un moment tonte mon aventure, et, sans faire le moraliste, il me plaignit, me blâma, et fit briller quelque espérance à mes yeux. Je lui parlai de la lettre que j’écrivais à Rozette, et lui avouai l’embarras où j’étais de la lui faire tenir. D’abord il n’y trouvait aucune difficulté, croyant qu’elle était renfermée dans l’endroit où l’on met d’ordinaire les pénitentes de ce genre, qui ne sont jamais repentantes. Mais, lorsque je lui eus assuré que Rozette était à Sainte-Pélagie, il fut déconcerté. Son découragement m’alarma, je demeurai dans cette situation accablante où l’on ne fait que sentir stupidement son malheur. Laverdure fit plusieurs tours dans la chambre, et, après une méditation profonde, il me dit qu’il tenterait, qu’il ne garantissait rien, mais qu’avant huit heures du soir, il me rendrait une réponse très positive. Je fus transporté d’allégresse. Je voulus lui remettre les dix louis qui étaient les seuls qui me restassent, mais il prit simplement la lettre en me disant que l’argent m’était nécessaire, que je gardasse celui-là ; qu’il avancerait la somme. Il se contenta de recevoir quatre pistoles pour les frais de sa commission. Il partit, je demeurai entre la crainte et l’espérance.

N’êtes-vous pas étonné, cher marquis, de mon attachement pour une maitresse de quelques jours ? Je l’aimais, je l’aime encore, et l’amour est extrême en tout. Quand elle m’eût été moins chère, ma vanité se serait roidie contre ceux qui voulaient me l’enlever. N’était-ce pas un devoir de ma part de ne pas abandonner une fille libertine, à la vérité, mais charmante, et qui n’était dans la tristesse que pour s’être tournée sur tous les sens pour me procurer du plaisir ?

Le bruit de mon aventure s’était répandu, elle servait de