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Page:Godard d’Aucour - Thémidore, 1908.djvu/56

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se ressemble assez ; elle est brillante lorsqu’elle roule sur la bagatelle ; ces filles-là possèdent bien leur matière.

Le diner se passa assez tranquillement ; j’en fus surpris, connaissant l’humeur impétueuse du président. J’ai toujours soupçonné que, pendant un moment d’absence avec Argentine, sous prétexte de rendre visite à un cabinet nouvellement meublé de Perse, il s’était précautionné contre les effets du vin de Champagne. Au reste, je le plains, s’il a été si longtemps sage sans préparation. Pour moi, je m’aperçus bien que l’on n’est pas réservé quand on le veut. Est-ce un si grand mal de n’avoir pas un empire absolu sur la nature ? On dit qu’il y a de la gloire à prendre sur elle ; je trouve qu’il y a plus de plaisir à lui laisser prendre sur nous.

Déjà les propos enjoués avaient animé notre repas ; quelques couplets de chansons assez libres avaient fait naitre des désirs agréables, plusieurs baisers avaient, en conséquence, effleuré les charmes de nos convives, qui ne résistaient qu’autant qu’il en fallait pour se donner une réputation de s’être défendues. Nous ne songions à personne lorsque Laverdure nous annonça que l’on pensait très fort à nous, et nous remit une lettre de la part de Rozette.

Le président la décacheta avec empressement, elle était badine, et nous félicitait sur l’aimable désordre où elle supposait que nous devions être, et nous avertissait qu’avant une demi-heure, elle partagerait nos amusements. On but à sa santé ; je le fis d’une façon trop marquée. Le cœur se trahit aisément, on le prend sur le fait à chaque rencontre. Cette façon découvrit à Argentine et à Laurette que je lui donnais la préférence. Toute femme