au jardin. Semblable guide était propre à l’égarer. Apparemment qu’ils se fourvoyèrent en chemin, et tombèrent dans quelques broussailles, car nous remarquâmes que la rosée avait gâté la robe de celle qui, je crois, n’était point sortie pour examiner les étoiles.
Je ne réussis pas à engager Rozette de venir avec moi, elle savait que je tenais d’elle mon rajeunissement, et elle ne voulait pas que je lui remisse son bienfait. Qu’un cœur né généreux souffre lorsqu’on lui interdit les moyens de témoigner sa reconnaissance !
Le souper fini, nous montâmes en carrosse, le président était revenu de ses vapeurs. Il le prit sur un ton gai, et nous dit de très plaisantes choses. Son libertinage est ordinairement à fleur d’esprit.
À peine étions-nous placés, arrivent dix personnes et un grand bruit avec elles. On appelait le président par son nom, et on lui demandait de loin sa protection. Je mets la tête à la portière : le président regarde aussi. Ah ! Monseigneur, s’écria un vieillard avec une voix cassée, voici ma femme (c’était une grosse laide toute bourgeonnée autant que je pus voir à la lumière de deux lanternes) : nous nous recommandons à votre bonne justice. Notre procès se juge demain, il s’agit... Le vieux plaideur n’allait-il pas nous détailler son affaire, et ses voisins qui l’accompagnaient n’allaient-ils pas aussi tous crier ensemble, lorsque le président leur dit en fureur : Qui diable vous a donné l’idée de venir ici ? Pardon, s’écria la troupe, monseigneur, nous vous avons reconnu pendant que vous étiez dans le jardin, et nous sommes tous montés au grenier pour avoir l’honneur de vous voir. Voici un mémoire dressé à la hâte, monseigneur, continuait le Nestor de ce village, j’espère en votre bonté. Donnez, donnez,