Page:Godwin - Caleb Williams, II (trad. Pichot).djvu/257

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traite du pays de Galles et je n’y vis que trop bien le présage de ce que l’avenir pouvait me réserver ailleurs. M. Falkland avait pris à sa solde l’infernal Gines, l’homme le plus propre, sous tous les rapports, au service qu’on attendait de lui, d’abord par son caractère naturellement cruel et impitoyable, ensuite par les habitudes de son esprit rempli à la fois d’audace et d’astuce, enfin par la haine envenimée et l’implacable vengeance qu’il m’avait jurées. L’emploi pour lequel cet homme était payé consistait à me suivre de place en place, à l’effet d’y détruire ma réputation et de m’ôter la chance d’y acquérir, par une longue résidence, un caractère d’intégrité capable de donner quelque poids à mes dénonciations, si je tentais par la suite de les renouveler. Il était venu dans le lieu de ma retraite avec les maçons et les ouvriers dont j’ai parlé ; tout en prenant les plus grandes précautions pour n’être pas aperçu de moi, il avait eu soin de répandre de tous côtés ce qui était le plus propre à ses vues, c’est-à-dire à me faire passer aux yeux de mes voisins pour le plus pervers et le plus infâme de tous les hommes. Ce fut lui, sans aucun doute, qui avait fait circuler ce détestable papier que j’avais trouvé avant mon départ dans la maison où je logeais. Dans tout ceci, M. Falkland, raisonnant toujours d’après ses principes, ne faisait que prendre des précautions nécessaires. Il y avait dans son caractère quelque chose qui lui faisait envisager avec horreur l’idée de mettre fin à mon existence par quelque moyen violent, en même temps que, malheureuse-