Page:Godwin - Caleb Williams, II (trad. Pichot).djvu/77

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étions dans un pays de chrétiens ; mais on n’aurait pas le cœur de traiter un chien de cette façon-là ?

— Il ne faut pas dire cela, Thomas. Ce sont des choses que le gouvernement a réglées ainsi dans sa sagesse.

— Peste, j’ai été bien pris pour dupe, toujours ! Ils ne font que nous dire que c’est une si belle chose que d’être Anglais ! avec leurs grands mots de liberté, de propriété et ce qui s’ensuit, je vois que tout cela c’est autant de chansons. Seigneur Dieu ! que nous sommes sots ! Voilà ce qui se passe pourtant sous notre nez, et nous n’en savons seulement rien, pendant qu’un tas de graves docteurs, avec un air capable, viennent nous jurer que ces choses-là n’arrivent jamais qu’en France et dans d’autres pays semblables !… Mais enfin, vous avez été jugé, n’est-ce pas ?

— Non.

— Et qu’est-ce que cela signifie donc d’être jugé, quand on commence d’abord par faire à un homme pis que de le pendre ? Ma foi, tenez, maître Williams, vous avez été bien méchant, il faut en convenir, et je crois, Dieu me pardonne, que j’aurais eu du plaisir à vous voir pendre. Mais je ne sais comment cela se fait ; avec le temps, le cœur s’attendrit malgré qu’on en ait, et la pitié finit par prendre le dessus. Cela ne devrait pas être, j’en conviens ; mais, quand je parlais de vous voir pendre, je n’entendais pas que vous auriez encore toutes ces choses-là à souffrir par-dessus le marché. »

Thomas me quitta aussitôt après cette conversa-