Page:Godwin - Caleb Williams, II (trad. Pichot).djvu/95

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que tout à coup ma résolution parut m’abandonner, et je me sentis près de tomber en défaillance. Mon charitable conducteur s’en aperçut, et il se mit à m’encourager de temps en temps d’une manière si affectueuse, si pleine à la fois de bonté et d’enjouement, si éloignée en même temps de la dureté et de la faiblesse, qu’en vérité je crus marcher sous la conduite d’un ange plutôt que d’un homme. Il me fut aisé de voir qu’il n’y avait rien dans ses façons qui se ressentît de la rudesse campagnarde, et qu’elles annonçaient un homme habitué à une politesse ouverte et affectueuse.

Nous marchâmes environ trois quarts de mille dans le bois, non pas du côté qui conduisait à la campagne découverte, mais au contraire en nous enfonçant toujours dans la partie la plus épaisse et la moins fréquentée. Nous traversâmes un endroit qui avait autrefois formé un large fossé, et qui, maintenant sec en grande partie, contenait seulement çà et là un peu d’eau bourbeuse et stagnante. Dans l’enceinte de ce fossé, je n’aperçus autre chose qu’un amas de ruines et quelques vieilles murailles qui semblaient prêtes à s’écrouler. Mais mon conducteur me fit passer sous une espèce de voûte, et ensuite par une allée tortueuse et obscure, au bout de laquelle nous nous arrêtâmes.

Il y avait là une porte qu’il ne m’était pas possible d’apercevoir, et à laquelle frappa mon conducteur. Une voix qui, par sa force, aurait pu passer pour une voix d’homme, mais qui, par le son aigre et aigu de la finale, avait quelque chose de féminin, demanda :