Page:Godwin - Caleb Williams, I (trad. Pichot).djvu/137

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que chose qu’il ne voudrait pas céder. Je perdrai tout ce que j’ai, j’irai travailler à la journée et mon fils aussi, s’il le faut ; mais je n’en ferai jamais un domestique.

— Bien, bien, l’ami, très-bien ! répliqua M. Tyrrel écumant de rage. Vous vous en souviendrez ; comptez là-dessus : je rabattrai votre insolence, Dieu me damne ! Où en sommes-nous donc ? Un misérable qui tient une ferme de quarante acres ose narguer le seigneur de la baronnie ! Je vous écraserai en poussière sous mes pieds ! Ayez soin, coquin, je vous en avertis, de fermer votre maison, de quitter ma terre, et de vous en aller comme si le diable était à vos trousses ! Estimez-vous trop heureux, si vous vous en tirez la vie sauve, de ce que j’ai encore plus de patience que vous n’en méritez. Quand il s’agirait, pardieu ! de tout l’or des Indes, je ne voudrais pas souffrir un drôle comme vous une heure de plus sur ma terre.

— N’allons pas si vite, n’en déplaise à Votre Honneur, répliqua Hawkins d’un ton ferme ; j’espère que vous en viendrez à penser mieux, et que vous verrez que je ne suis pas à blâmer ; mais, quand cela ne serait pas, il y a du mal que vous pouvez me faire, et il y en a que vous ne pouvez pas. Quoique je ne sois qu’un homme de travail, n’en déplaise à Votre Honneur, je suis un homme, voyez-vous ? Fermer ma maison, oh ! que non. J’ai un bail de ma ferme, et je ne la quitterai pas comme cela. J’espère qu’il y a des lois pour les pauvres gens aussi bien que pour les riches. »